Une certaine idée de la guerre (3/4)

« La guerre c’est loin… loin… »

 

Malgré quelques dérangements du quotidien, comme les bombardements, la guerre ne semble pas affecter les habitudes parisiennes mondaines du jeune Jacques.

En janvier 1915, il écrit d’ailleurs, à propos de Paris : « Guerre : on s’en occupe heureusement beaucoup moins ici ». Le fait qu’il parle peu de la guerre ne signifie pas qu’il ne la voit pas. Il semble vivre dans le déni, répondant à une protection de l’esprit face à une horreur humaine qu’il ne peut pas concevoir. En somme, ce qui sort de l’idée qu’il veut se faire du monde n’est pas mentionné ; ses notes et ses albums sont bien plus réels que la guerre, qui se joue loin de lui.

Il écrit d’ailleurs en 1916 : « […] Mais ici, à Paris, avec ce temps de printemps : la guerre c’est loin… loin… […] Ce petit agenda n’étant pas destiné aux autres il doit contenir toutes mes vérités : je n’ai pas le droit de dire que je m’amuse au milieu d’un cataclysme […] Oui je pense à la guerre ; mais j’y pense avec une espèce de joie, un peu mystérieuse qui donne l’impression qu’on est monté au-dessus de toutes les craintes […] »

Lartigue ne nourrit aucune ambition de se faire le chroniqueur d’une guerre qui le dépasse : il est moins le témoin d’une période que celui de sa propre vie.